Le Mystère de l'Ecu Terreux épisode 11

  Ils arrivèrent au pensionnat de jeunes filles vers huit heures trente. Toutes les demoiselles qui y habitaient avaient fini leur toilette et s'étaient rendues dans les différentes salles de classe de l'établissement afin d'y étudier les matières les plus élémentaires telles que "vider une dinde avec les pieds tout en changeant le cul d'un mioche avec ses mains" ou encore "séparer la vision entre l'œil droit et l'œil gauche afin de surveiller à la fois le rôti qui cuit et les gosses qui jouent". Il était clair que toutes ces jeunes filles se préparaient au brillant avenir de femme au foyer. Elles ne représentaient donc en aucun cas une menace pour la mission de la petite troupe d'aventuriers qui se tenait déja devant les portes du pensionnat.
  Sagrat prit la parole:
  -Bon, écoutez-moi bien. On va suivre Marcel comme son ombre. Il ne faut pas qu'on se fasse remarquer car cinq gars dans notre genre qui se font choper dans un pensionnat de jeunes filles, c'est un coup à finir émasculés!
  A cette pensée, toutes les gorges se nouèrent et on entendit même un petit pet que tous ignorèrent sans savoir qui l'avait lâché, car là n'était pas l'important!
  Marcel leur montra un trou dans le grillage du terrain de jeu de paume par lequel il avait l'habitude de se faufiler pour pénétrer dans les vestiaires et aller mater ces tendres jeunes filles qui s'ébattaient joyeusement sous la douche. Arrivés face au mur des vestiaires, Marcel leur montra la caisse sur laquelle il grimpait pour pouvoir accéder à la petite fenêtre toujours entrouverte qui permettait à l'humidité de s'échapper. Cette ouverture culminait à un mètre quarante du sol. Fomahn eut un sourire narquois lorsqu'il dut tout d'abord porter Marcel pour l'aider à entrer et ensuite se plier en deux pour pouvoir lui-même passer. Marcel dit:
  -Vous voyez ce panneau de bois?
  -Lequel? demanda Sagrat. Ils sont tous pareils!
  -Là est l'astuce! dit Marcel. Si on ne le connait pas, il est introuvable, insoupçonnable! C'est un panneau de bois sans tain!
  -Qu'est-ce que c'est encore que ces conneries? demanda Sagrat. Je connais les miroirs sans tain mais les panneaux de bois...
  -C'est ça qui est génial! reprit Marcel. C'est un bois qui est cultivé directement dans les jardins de Lucifer! Aucun mortel à part moi et vous maintenant n'en soupçonne l'existence! Cela fait des siècles que des pénitents sont torturés ici et que les jeunes filles n'ont jamais rien soupçonné car en plus d'être sans tain, ce bois est un isolant phonique parfait! Pas un hurlement des damnés n'est perçu de ce côté du mur!
  Marcel s'approcha du mur qui avait vraiment l'air d'être un mur ce qu'il y a de plus normal et commença à dessiner avec le doigt un symbole. Il traça un cercle, suivi d'un second, accolé au premier, et entre les deux, il dessina un long tube bien droit. Quel pouvait être ce symbole? De quelle civilisation ancienne pouvait-il bien provenir? Ça, nos amis ne le découvriront sûrement jamais!
  Le pan de mur recula légèrement et coulissa ensuite sur la droite, libérant ainsi un passage dans le vestiaire du pensionnat de jeunes filles. Madame Peurien avait dit la vérité!
  -Voilà! dit Marcel. D'ici vous pouvez descendre directement en Enfer pour mener à bien votre mission. Je vais donc vous laisser. Adieu, heureux de vous avoir connus!
  -Tut tut tut...fit Sagrat. C'est bien essayé, mon pti Lutin, mais je t'ai dit que tu nous accompagnerait jusqu'au bout! Tant que je ne tiendrais pas l'Ecu terreux entre mes mains, tu resteras avec nous, sinon, j'envoie Larry faire un tour de magie à ta chère môman.
  -Non! C'est bon, je viens avec vous!
  -Mais il est con lui ou quoi? dit Larry à Gheul-Tâh. Je suis sûr que j'arriverais épater la vieille avec mon tour de la chaussette dansante! C'est un tour incroyable où j'arrive à prendre le contrôle de ta chaussette alors qu'elle est encore à ton pied et que j'arrive à la faire danser ce qui fait que...
  -Vos gueules maintenant! l'interrompit Sagrat. On descend en silence car personne ne sait quelles horreurs nous allons trouver durant notre périple.
  -Bah! Ce sera certainement pas plus laid que la vieille Peurien, ironisa Larry.
  Marcel lui lança un regard si noir du haut de ses quatre-vingt centimètres que Larry n'osa pas le soutenir, de crainte qu'il lui saute à la gorge et lui déchiquète la jugulaire tel un pit-bull enragé.
  Les cinq compagnons d'aventure commencèrent donc leur descente aux Enfers dans un silence absolu, si ce n'est le bruit de leurs estomacs car une pomme et un verre d'eau, c'est vraiment peu pour des gaillards tels qu'eux, capables de s'envoyer un cochon à la broche entier dès le petit-déjeuner accompagné de deux ou trois pintes de bière. Mis à part Marcel qui lui bien sûr, était rassasié avec une pomme qui paraissait être presque aussi grosse que lui!
  Ils avançaient prudemment en suivant l'interminable escalier fait de pierre rouge tout en prenant bien soin de ne pas toucher aux parois brûlantes qui les entouraient. L'atmosphère était de plus en plus suffocante au fur et à mesure de la descente, à tel point que le café de Gheul-Tâh était de plus en plus nerveux dans son mini chaudron scellé par un sort de magie exécuté par Larry, ce qui ne rassurait en rien le reste de la troupe!

                                                                  A suivre...