Le Royaume d'Endemor: la Bataille de Gurkas épisode 10

  - Mais comment peut-il savoir?
  -Galen-Rhâ a créé un lien télépathique avec lui juste avant sa mort, pour se venger de toi et ta pitoyable équipe.
  -Tu m'as hypnotisé. Voila pourquoi je n'étais plus moi-même.
  -Oui mon mignon. Et maintenant je vais te tuer et me repaitre de ton corps.
  Sur ces dernières paroles, elle se jeta sur lui, toutes griffes et crocs dehors. Arkhonos trébucha sous le poids de la Succube qui n'était plus du tout la frêle et jolie jeune femme avec qui il partageait sa couche il y a quelques instants. Les griffes du monstre déchiraient le corps d'Arkhonos qui se débattait comme un diable pour sauver sa vie. Il devrait peut-être laisser sa vie dans cette mission, mais certainement pas dans la chambre d'une auberge. Il repoussait tant bien que mal les attaques de Shauna, envoyant tout valdinguer dans la pièce, espérant ainsi attirer l'attention de ses compagnons. C'est au moment où il voulut appeler à l'aide qu'il ne vit pas la puissante main du monstre lui asséner un terrible coup derrière la nuque. Arkhonos s'écroula, inconscient.
  -Le jeu est terminé mon mignon, dit Shauna en approchant ses crocs de la gorge d'Arkhonos.
  A l'instant où elle allait commencer à le dévorer, Calder et Godeffroy firent irruption dans la chambre.
  -Arrête, monstre! Lâche-le! hurla Godeffroy.
  La succube les regarda à peine et reprit son mouvement.
  -Aï gazah Razena, marmonna Calder.
  Le monstre fut projeté en arrière en poussant des hurlements de douleur.
  -Qu'as-tu fait? hurla Shauna.
  -J'ai invoqué Razena, Dieu de Justice, de nous venir en aide, répondit Calder. Et je vais recommencer!
  -Non, arrête!
  -Aï gazah Razena! reprit Calder avec conviction.
  -Nooon! hurla le monstre juste avant d'exploser et de s'étaler sur tous les murs de la chambre.
  Les deux hommes, couverts de tripes et de divers morceaux de la Succube, se précipitèrent vers Arkhonos.
  -Il est vivant, dit Calder.
  Godeffroy poussa un soupir de soulagement.
  Arkhonos reprit doucement ses esprits. En contemplant l'état dans lequel était sa chambre, il regarda Calder et Godeffroy et leur dit:
  -Merci mes amis. Sans vous...
  Les deux hommes hochèrent la tête en signe de compréhension.
  -Retournez vous reposer. Nous partons dès l'aube, dit Arkhonos.
  Et ils s'en allèrent en silence, laissant Arkhonos seul au milieu de cette boucherie.
  Au petit matin, ils quittèrent "l'Antre de la Bête", jamais auberge n'avait aussi bien porté son nom, et le village de Kerthag, encore abasourdis par les évènements de la nuit précédente, qui ne fut pas de tout repos comme ils l'avaient espéré. Personne ne parlait de ce qu'il s'était passé, et on en parlerait sûrement jamais plus, mais les cicatrices sur le corps d'Arkhonos resteraient à jamais les témoins muets de cette sombre soirée.
  Cela faisait maintenant quatre jours qu'ils avaient quitté Gurkas et chacun commençait à se poser des questions sur le sort de leurs compagnons d'armes restés là-bas. Résistaient-ils toujours à l'ennemi? Avaient-ils été vaincus? Ils ne le sauront probablement jamais si les Prêtres-Dragons décident de ne pas les aider et de les dévorer.
  Arkhonos s'approchant de Calder lui demanda:
  -Dis-moi, mon vieil ami, aurais-tu dans ta panoplie de tours et de pouvoirs, un moyen de savoir où en est notre Armée?
  -Je pourrais peut-être essayer de voir ce qu'il s'y passe en faisant la lecture des entrailles d'une truite encore vivante...Mmmmh'Oui! Trouvons une rivière!
  Et ils firent un détour d'environ deux kilomètres jusqu'à une petite rivière, qui se jetait en aval dans le grand fleuve Orb. C'est Godeffroy qui fut nommé pêcheur de truite. Pour se faire, il improvisa une épuisette de fortune avec sa lance et un filet qui contenait des provisions. Ainsi équipé, il mit environ une heure à attraper enfin une truite de taille modeste, mais qui suffirait amplement pour l'usage que Calder allait en avoir. Le vieux mage saisit la truite et la regarda d'un air désolé en lui ouvrant soigneusement le ventre à l'aide d'un coutelas très aiguisé. Il détestait faire cela, mais le rite de lecture l'exigeait. Il commença:
  -Je vois des morts, beaucoup de morts! Un immense champ de bataille. La Désolation! Beaucoup des nôtres sont morts, mais je ne vois plus de Vikings!
  Un grand sourire apparût sur chaque visage de la petite troupe. La truite, à l'agonie, se débattait. Calder reprit:
  -Je vois aussi le Capitaine Gurdan. Son corps saigne et son cœur est assombri par la douleur des évènements. Ce fût un massacre. Seule une poignée des nôtres a survécu. Peut-être trois cents, voire cinq cents au maximum. Gurdan est inquiet, au bord des abîmes du désespoir...Oh non!
  -Quoi? Que vois-tu? dit Arkhonos.
  -Les Barbares du Sud arrivent sur nos terres. Environ dix mille hommes...
  La truite cessa de s'agiter et mourut.

                                                    A suivre...